Chaque année le 16 mars, un nombre important d’Occitanes et d’Occitans se retrouve à Montségur en Ariège pour commémorer le funeste bûcher qui, le 16 mars 1244, fît entre 215 et 220 victimes. Celles-ci, non-violentes, ont été brûlées vives pour avoir refusé de renier leur foi cathare. Cette année comme les précédentes, une délégation du Parti de la Nation Occitane y est présente.
Chaque participant honorant la mémoire des victimes à sa façon, et celles-ci étant multiples, Jacme Pince, animateur dynamique du groupe de réflexions « Occitania e libertat » et chroniqueur occasionnel pour le Lugarn, a choisi cette année de nous proposer un poème. La chose n’est certainement pas assez connue, mais le fervent militant occitaniste est aussi un poète imaginatif et sensible. Créateur bilingue, il nous propose en ce jour de solennelle commémoration un même texte en version occitane et française.
Les camins blaus
Flamas, foguèron al crusòl de l'amor,
Amnas, creguèron al sens de lor vida,
E suls camins blaus, espiats pels voltors
Anavan descauces sens que la rota desvièsse pas.
Qué fa se la carga nos pareis excessiva,
A cadun son torment, sa digna desrason,
Perque suls camins blaus de còps las jòias son vivas
E d'aquelas mans tibadas florissiá le perdon.
Èsser diferent vos es pas excusa
Vos es pas pecat e obrís l'orizont.
Al delà dels camins blaus e al delà de las rusas
Sètz demorats fidèls, quitament en mòrnas sasons.
Se podèm cremar le fuòc, esfaçar le lum ?
Qui vòl tuar la Patz e se pensar poderós ?
Ieu suls camins blaus ai pas vist sonque fraires
Que marchavan descauces, e a l'Esperit presents.
Les chemins bleus
Flammes ils furent au creuset de l’amour,
Âmes ils crurent au sens de leur vie,
Et sur les chemins bleus, épiés des vautours
Ils allaient les pieds nus sans que route ne dévie.
Qu’importe si la charge nous paraît excessive,
À chacun son tourment, sa digne déraison,
Car sur les chemins bleus parfois les joies sont vives
Et de ces mains tendues fleurissait le pardon.
Être différent ne vous est pas excuse
Ne vous est pas péché et ouvre l’horizon.
Au-delà des chemins bleus et au-delà des ruses
Vous êtes restés fidèles, même en mornes saisons.
Peut-on brûler le feu, effacer la lumière ?
Qui veut tuer la Paix et se penser puissant ?
Moi sur les chemins bleus je n’ai vu que des frères
Qui marchaient les pieds nus, et à l’Esprit présents.
Jacques Pince
(16 mars 2025)