Ainsi donc le pape François n’ira pas à Paris inaugurer la réouverture de la cathédrale Notre-Dame le 8 décembre 2024 auprès du chef de l’île de France Emmanuel Macron, malgré l’invitation du Chef de l’État français… Quel camouflet pour l’orgueil du coq gaulois !
Mais François préfère une île de la Méditerranée, où il est invité par le cardinal basque Bustillo le 15 décembre pour rencontrer le Peuple Corse, loin des mondanités élyséennes. Qui pourrait le lui reprocher ?
En effet que représente Notre-Dame de Paris ? Un monument historique, architecturalement remarquable certes, mais symbolisant toutes les conquêtes impérialistes des monarchies et des républiques. Et gageons que, le 8 décembre, le Président de la République ne manquera pas d’exalter une fois de plus les vertus guerrières et les conquêtes territoriales « qui ont fait la grandeur… et l’unité de la France ! » … Or à quel prix pour les peuples intégrés à coups de sabres et de bûchers ?
Que représente donc ce monument pour Toulouse et les Occitans ? Il est une date qui a marqué nos mémoires et notre Histoire : le jeudi 12 avril 1229 c’est sur le parvis de Notre-Dame que fut dévoilé le honteux traité de Paris trafiqué par le cardinal Frangipani, au nom du roi Louis IX dit « Saint-Louis » (Après avoir modifié unilatéralement les termes négociés à Meaux en janvier 1229 !). Un traité qui signifiait à terme l’annexion du comté de Toulouse, la fin des libertés communales et qui préfigurait un siècle d’inquisition.
Après la lecture des 32 articles de ce traité, Raimon VII sera humilié devant toute la cour de France : « en chemise et en braie, les pieds nus », dit le chroniqueur, il sera conduit par Frangipani devant le grand autel de Notre-Dame pour entendre levée son excommunication…
Devant Louis IX, le légat Frangipani flagelle Raimon VII avec une verge (miniature de 1296).
À travers le comte de Toulouse, c'est tout le peuple occitan qui est traîné à terre, bafoué, trahi, humilié et bientôt colonisé. Les auteurs de l'Histoire du Languedoc, pourtant bénédictins, écriront au début du 18e siècle : « On voit par ce traité que les principaux instigateurs de la guerre contre Raymond, songeaient bien moins à s'assurer de sa catholicité qu'à le déposséder de ses domaines et à s'enrichir de ses dépouilles. » Et le troubadour toulousain Guilhem Figueira, contemporain des faits, crie sa colère contre l’Église :
« Rome, si grande est votre forfaiture
Que de Dieu et ses saints plus personne n'a cure
Votre règne est maudit, Rome fausse et parjure
C'est par vous que se fond
S'étiole et se confond
Ici-bas toute joie. De quelle démesure
Accablez-vous Raimon ! »
(Traduction de l’occitan)
On peut voir aujourd’hui l’original du Traité de Paris à l’exposition sur les Cathares au musée Saint-Raymond de Toulouse jusqu’au 5 janvier 2025.
Original du Traité de Paris (1229) : Parchemin avec sceau du Comte Raimon VII (Archives Nationales).
JORDI LABOUYSSE