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Occitan : combien de locuteurs demain ?

Combien de locuteurs compte l’occitan aujourd’hui ? Avant d’hasarder un chiffre, encore faudrait-il définir ce qu’on entend par locuteur. Combien de mots occitans faut-il connaître pour prétendre parler l’occitan ? 500 ? 1000 ? Aux linguistes professionnels (dont je ne suis pas) de le dire. Parler couramment une langue signifie aussi être capable d’utiliser avec aisance des registres différents. On ne parle pas de la même manière selon que l’on s’adresse à ses proches, aux copains, à des générations différentes, à des inconnus, à l’administration. Donc, si des études basées sur des enquêtes linguistiques sérieuses sur le plan scientifique font varier le nombre de locuteurs pour l’occitan de trois millions, fourchette haute, à 110.000, fourchette basse, c’est tout simplement qu’elles ne donnent pas les mêmes sens au mot locuteur. Puis, il y a le vécu de chaque militant occitan. Il faut éviter néanmoins de généraliser à partir de son expérience personnelle pour conclure qu’en milieu urbain, on ne parle pas ou peu ou plus occitan et qu’à la campagne on le parle encore un peu sans tenir compte des variations régionales qui peuvent être importantes. Il faut aussi mettre à part la situation plurilinguistique au Val d’Aran et dans les vallées occitanes d’Italie qui est très particulière. Quoi qu’il en soit, nous manquons d’une enquête linguistique approfondie et scientifique à l’échelle de l’Occitanie toute entière et de ses régions pour avancer un chiffre crédible de locuteurs. Finalement cela n’est pas si important. Si nous voulons que les jeunes générations deviennent des locuteurs de l’occitan, nous ne pouvons pas nous contenter des classes bilingues et des calandretas qui dans le système étatique français actuel ne parviennent à toucher qu’un pourcentage infime des élèves scolarisés en Occitanie. Cela signifie que le problème est essentiellement politique. On peut compter sur la mauvaise volonté de l’Etat français quelle que soit la couleur politique du gouvernement en place pour n’accorder que des miettes sur le plan de la démocratie linguistique. Tant que les régions n’auront pas plus de pouvoirs, elles ne seront pas un relais efficace. Il faut au minimum l’autonomie et mieux encore l’indépendance de l’Occitanie. Et même une Occitanie indépendante avec une République fédérale ne pourrait pas garantir la resocialisation de la langue. Encore faut-il que les Occitans de souche ou d’adoption le veuillent. L’exemple du gaélique dans la République d’Eire nous montre qu’il ne suffit pas d’une politique volontariste de l’Etat pour promouvoir la renaissance linguistique. Mais après tout, les révolutionnaires algériens ont utilisé le français pour leur propagande, pas l’arabe ni le berbère. Le contre-exemple positif pour nous, c’est la renaissance de l’hébreu passée de langue essentiellement cultuelle à langue moderne de communication et adoptée par les sionistes. Domergue Sumien a raison de parler de la nécessité d’une reconquête linguistique sans complexes à condition qu’elle aille de pair avec la conquête du pouvoir politique en Occitanie par les occitanistes. C’est la démarche volontariste du Manifeste occitaniste. A l’attention de Terric Lausa, je veux dire que je comprends sa frustation d’être « estrangièr del dedins » comme le dit Joan Larzac. Mais à quoi sert-il de dénoncer les collabos de l’Etat français criminel et lingüicide ? A quoi sert-il de dénoncer à longueur de colonnes la FELCO et le Partit Occitan. Ne vaut-il pas mieux se serrer les coudes pour nous affranchir peu à peu d’un Etat qui nous opprime. Travaillons plutôt avec tous ceux, occitanistes, provençalistes, anti-jacobins qui contribuent à l’émancipation de notre nation occitane en français ou en occitan. Après la dénonciation, passons à l’action ensemble.

Jean-Pierre Hilaire

10 Juillet 2014

Tag(s) : #Tribune libre
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