Le N°154 de la revue Lo Lugarn est en ligne.
Pour la télécharger gratuitement au format pdf c'est ICI
Vous pouvez aussi vous abonner à la version "papier".
Éditorial en français.
Il est souvent question de l’Algérie dans les médias français actuellement et des rapports plus souvent conflictuels qu’amicaux entre l’État français et l’État algérien depuis la création de ce dernier en 1962.
Ce fut après une guerre sanglante de 1954 à 1962 et les accords d’Évian qui scellaient l’indépendance de l’Algérie jusqu’alors considérée comme faisant partie de la France aux yeux du gouvernement français. Cela bien que l'Assemblée générale de l’ONU ait réaffirmé le 11 décembre 1957 la nécessité pour tous les pays de respecter le droit des peuples à disposer d'eux-mêmes.
En 2017, lors d’une visite à Alger, le président de la république française, Emmanuel Macron, avait cru apaiser les tensions en déclarant que la colonisation était un crime contre l’humanité.
Il n’en a rien été. La France en reconnaissant récemment la souveraineté du Maroc sur le Sahara occidental, ex colonie espagnole, alors qu’Alger soutient le Front Polisario qui la revendique a provoqué un casus belli dans ses relations avec l’Algérie. En représailles, les autorités algériennes refusent de reprendre leurs ressortissants frappés d’OQTF (1).
Elles ont emprisonné l’écrivain francophone, binational algérien-français, Boualem Sansal, critique acerbe de leur régime et contraint un autre écrivain algérien francophone, Kamel Daoud, prix Goncourt, à l’exil à Paris. Il avait osé évoquer la guerre civile, ce qui est interdit par la loi algérienne.
Les expulsions réciproques de diplomates et de personnel administratif se succèdent.
Le régime algérien qui prospère grâce à la rente mémorielle, attise le ressentiment contre l’ex colonisateur.
Il tente également de manipuler l’importante diaspora algérienne arabo-berbère ou les Français d’origine algérienne vivant dans l’État français.
Nous, nationalistes occitans ethnistes, ne sommes pas indifférents au sort de l’Algérie. Il faut rappeler que François Fontan a créé le Parti Nationaliste Occitan, devenu Parti de la Nation Occitane en 2004, en 1959, c’est-à-dire en pleine guerre d’Algérie. Le Parti s’est prononcé aussitôt pour l’indépendance de l’Occitanie mais aussi pour celle de l’Algérie.
François Fontan et Jacques Ressaire ont concrétisé cette prise de position en devenant « porteurs de valises » pour le FLN, ce qui leur valut la prison et plus tard pour François Fontan l’exil dans les vallées occitanes d’Italie.
Mais Fontan n’avait pas peur de dire à ses amis du FLN qu’il y avait deux peuples en Algérie : les Arabes et les Berbères et qu’après l’indépendance, il faudrait au minimum accorder l’autonomie aux Berbères de Kabylie, un discours que les membres du FLN refusaient d’entendre et qui aurait valu une exécution s’il avait été tenu par l’un d’eux. Tout en soutenant le FLN dans la guerre d’indépendance, Fontan avait pris position pour le courant "berbéro-matérialiste" contre le courant "arabo-islamique" qui s’affrontaient dans le FLN jusqu'à la victoire du second, au congrès de la Soumma (1957) et l’élimination du premier.
Historiquement, à partir du VIIIe siècle, les Arabes sont les envahisseurs d’un Maghreb berbère qu’ils ont progressivement mais pas complètement arabisé et islamisé.
Aujourd’hui en Algérie, les berbérophones sont 10 millions soit un quart de la population et vivent principalement en Kabylie, dans le Nord du Sahara et les grandes villes où on les appelle Mozabites et enfin les Touaregs sont présents dans le Sud algérien, le Mali et le Niger voisins.
Bien que le régime algérien, émanation du FLN, se définisse comme arabe et musulman, il n’existe pas de nation algérienne pas plus que de nation marocaine ou tunisienne comme le montre la carte ethnolinguistique du Maghreb.
Mais l’idéologie du pouvoir algérien, celui de l’armée alliée avec les islamistes après les avoir combattus lors de la guerre civile des années 1990, définit l’Algérie comme une nation arabe et musulmane même si le tamazight a le statut de langue officielle mais pas de langue nationale.
L’Algérie est à la fois un morceau de la grande nation arabe morcelée en une multitude d’États souvent antagonistes, soit autoritaires soit contrôlés directement ou indirectement par les islamistes.
Le nationalisme arabe unificateur que préconise le PNO est inexistant aujourd’hui.
En dehors des pays musulmans, les islamistes ont pour objectif de travailler au corps les communautés musulmanes en prônant avec la charia le séparatisme culturel et religieux et au-delà en visant l’islamisation de la planète entière dans le temps long.
Quant à l’Algérie, tant que sa nombreuse jeunesse arabe et berbère qui faute de perspectives aspire à quitter le pays, ne relèvera pas la tête et ne fera pas tomber ce régime prédateur et corrompu, la situation restera bloquée.
Mais ce régime est fragile et les peuples ne renoncent pas si facilement à la liberté et à l’auto-détermination.
La jeunesse est l’avenir de l’Algérie, elle pourrait changer la donne. Elle a échoué avec le printemps de Tizi Ouzou en 1980 en Kabylie, l’Hirak (2) mais rien n’est perdu. Le Feu la Prochaine Fois ! (3)
Notes
(1) Obligation de quitter le territoire français
(2) De 2019 à 2021, mouvement populaire d’opposition au maintien au pouvoir d'Abdelaziz Bouteflika et de son régime
(3) La prochaine fois, le feu (The Fire Next Time) : titre d’un roman de l’écrivain afro-américain James Baldwin
https://www.fnac.com/a11216370/James-Baldwin-La-prochaine-fois-le-feu