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Éditorial en français du n°150
Droit des peuples contre impérialismes
Le droit des peuples à disposer d’eux-mêmes, qui est en principe reconnu internationalement, est battu en brèche de toutes parts. À commencer par l’État français.
Un statut d'autonomie de la Corse, pourtant instamment réclamé par le peuple, et promis par le gouvernement français, n'a toujours pas été soumis au vote du parlement, où, même sous une forme 'décaféinée', son adoption est incertaine. De plus, le risque de censure par le Conseil constitutionnel existe.
Le président de la région 'Bretagne', soutenu par la majorité du Conseil régional et inspiré par le combat des Corses, demande, lui aussi, l’autonomie. Il se heurte à un mur. Si l’État semble prêt à accorder une autonomie limitée à la Corse, il ne l’envisage nullement pour les très technocratiques « régions françaises » alors que l'assemblée (consultative !) des régions le demande depuis 2021.
Quant à remodeler ces régions pour tenir compte de la volonté de leurs populations d'affirmer leur identité culturelle, historique et linguistique, ce ne sera pas facile même si c’est théoriquement possible.
Des redécoupages sont pourtant nécessaires pour la nation occitane (régions basque et catalane séparées, séparation d'avec la "Nouvelle- Aquitaine" du "Poitou-Charentes" - mais pas de la Charente Limousine, séparation d'avec "Auvergne-Rhône Alpes" et la métropole lyonnaise de l'Auvergne, de l'Ardèche et de la Drôme.
L’Alsace, pour donner un autre exemple, bien que pompeusement érigée en 'Collectivité Européenne d'Alsace, n’arrive pas à quitter la région Grand Est dans laquelle elle est incluse contre son gré. En outre, il conviendrait de rattacher à l'Alsace la Moselle germanophone.
Dans ce qui reste de l’empire français, au terme de trois référendums, dont le dernier a été boycotté par les indépendantistes, la Nouvelle Calédonie ou Kanaky, à l’issue d’un vote du Parlement français, va voir son corps électoral élargi aux résidents de plus de 10 ans.
Si cette réforme est appliquée, cela aurait pour effet de rendre minoritaire la population Kanak autochtone sur sa terre et donc de l’empêcher d’accéder à l’indépendance dans l’immédiat. Ceci alors que la population autochtone est toujours en "majorité relative" (démographique) et que politiquement les minorités ethniques océaniennes se rallient progressivement à l'indépendantisme, suite à la promotion de la "citoyenneté néo-calédonienne" par les indépendantistes.
Malgré les violences actuelles, la géopolitique et les intérêts économiques semblent bien plus importants pour la France que l’émancipation des Kanaks.
Dans les autres colonies françaises, les indépendantistes polynésiens, majoritaires chez eux depuis les dernières élections, ont l'intention de faire progresser leur revendication sans attendre (leur statut d'"autonomie" a déjà été raboté à deux reprises par le Conseil Constitutionnel, comme les statuts proposés pour la Corse, avec des arguments semblables). Le feu couve toujours à Mayotte. Et la Martinique et la Guadeloupe expérimentent les limites de l'"Autonomie" à la française.
Chez les voisins de l’Occitanie, à l’issue élections du parlement de la Generalitat de Catalogne, il n'y a plus de majorité pour aucune force politique. Pour autant les indépendantistes n'ont pas renoncé à gouverner "en minorité".
Nous verrons si Pedro Sanchez, premier ministre espagnol, l'accepte, ou ce que donneront d’éventuelles nouvelles élections. Le rêve d’indépendance de la Catalogne, brisé par la force en 2017 n’est pas à l’ordre du jour pour le moment. Le pouvoir impérialiste espagnol de gauche comme de droite, essaiera d’empêcher par tous les moyens « démocratiques » ou autoritaires légaux, selon la constitution espagnole, l’émancipation de la nation catalane et son unification.
En Écosse, les indépendantistes du SNP, jusqu’ici alliés aux écologistes, viennent de perdre leur majorité au Parlement écossais en raison de la rupture de cette coalition par les écologistes et ont vu démissionner leur sulfureux premier ministre, Houmza Yousaf d’origine pakistanaise, réputé proche des Frères musulmans. Les prochaines élections risquent de donner la victoire aux Travaillistes anti-indépendantistes.
La désaffection actuelle de l’électorat écossais pour l’indépendantisme et l’intransigeance du gouvernement britannique écartent à terme sans l’exclure la perspective de l’indépendance de l’Écosse.
Au coeur du continent européen, se déroule un conflit meurtrier. L’impérialisme russe qui refuse l’existence même d’une nation ukrainienne différente de la nation russe a recours à une guerre acharnée qui risque de tourner à son avantage si les États Unis et l’Union européenne ne fournissent pas à l’Ukraine de vrais moyens de résister à l’offensive russe et de la repousser sans parler, sujet sensible, d’envoyer des soldats comme ne l’a pas exclu Emmanuel Macron, pour l’instant isolé sur ce point.
Quoi qu’il en soit, le soutien de l'Europe occidentale à l’Ukraine est trop timide. Et le pacifisme de forces politiques de gauche comme de droite en Europe est en fait une forme de soutien à l'impérialisme russe qui s’exerce aussi en Géorgie actuellement.
Contrairement aux Ukrainiens, les Arméniens du Haut Karabakh, eux, n’ont pas reçu d’aide militaire des USA et de l’Union européenne. Ils ont été chassés de leurs terres millénaires par les Turco-Azéris avec l’appui de l’impérialiste turc Erdogan dans une indifférence quasi générale. L’existence même de la nation arménienne est en jeu.
Sans oublier Israël dont l’existence est menacée depuis sa création par l’impérialisme arabo-islamique et aujourd’hui persan avec ses affidés. Il a été attaqué en octobre dernier depuis Gaza et victime d’un véritable pogrom. La guerre de l’État hébreu pour éliminer le Hamas de Gaza a suscité une vague d’antisémitisme qui menace les Juifs du monde entier et pas seulement sur les campus européens et américains.
Devant l’alliance contre nature des impérialismes de pays réputés démocratiques et de dictatures plus ou moins sanguinaires, le droit des peuples à disposer d’eux-mêmes ne pèse pas lourd.
Les Occitans, dont la civilisation et la langue rayonnaient dans l’Europe entière au Moyen Âge sont en passe d’assimilation à la France une, indivisible, jacobine et monolingue.
Le mouvement occitan, combien de divisions ? Il fut un temps pas si lointain où il pouvait rassembler plus de 30000 manifestants pour la langue et l’Occitanie venus des 4 coins de ce pays écartelé entre quatre États.
Aujourd’hui, les militants politiques occitans qui n’ont pas peur de s’affirmer comme tels, comme ceux du Parti de la Nation Occitane, savent qu’il ne suffit pas de revendiquer. Tout part du pouvoir local et d’abord municipal qu’il s’agit de conquérir en formant des alliances pour avoir des élus.
C’est une œuvre de longue haleine mais le combat n’est pas pour autant désespéré. Certes, les Occitans se disent très majoritairement français mais quoi qu’on en dise, l’existence d’une région Occitanie a favorisé une prise de conscience nationale occitane et pas seulement dans cette région.
D’ailleurs, adhérent-ils vraiment à la France et au folklore de son roman national ? Peut-être pas massivement mais de là à accepter l’idée qu’ils ne sont pas français et que leurs intérêts sont différents de ceux des Français ethniques, il y a un pas qu’ils ont du mal à franchir.
Il faut les y aider mais avec pédagogie. Même s’ils ne parlent pas ou plus la langue, ils pourront la récupérer un jour ou l’autre.
Le Parti de la Nation Occitane est réaliste. Il est conscient de l’immensité de la tâche à accomplir pour l’émancipation de la nation occitane. Elle peut sembler insurmontable mais les seuls combats perdus sont ceux qui ne sont pas menés. Ce sera sans doute l’œuvre de nouvelles générations avec peut-être de nouvelles idées et de nouvelles méthodes d’action, qui auront appris des erreurs de leurs aînés, même s’ils n’ont pas démérité.
Il faut souhaiter qu’elles parviennent à concrétiser les idées de François Fontan et créent un monde de vraies nations indépendantes et amies dont l’Occitanie.